Le 28 mai 1952, un premier contrat est signé au ministère de la défense à Paris pour le financement par les Etats-Unis de la construction de navires de guerre dont 5 gabares de mer. Ces unités, réalisées en « off-shore » par les chantiers d'Europe Occidentale, remplacent les navires d'occasion cédés à partir de 1943 au titre du PAM (Pacte d'Assistance Mutuelle). Première unité type Cigale commandée par dépêche du 5 septembre 1952 aux Chantiers Normandie Penhoët, la gabare G1 AN94 est mise sur cale au Grand Quévilly au début de l'année 1953. Lancée le 21 novembre 1953, elle est officiellement attribuée à la France et baptisée Scarabée par décision du 30 avril 1954. Les essais de présentation en recette acquis le 4 juin 1954, il fait route vers Brest à partir du 9 juin pour effectuer ses essais officiels. Transféré par les Etats-Unis au cours d'une cérémonie se déroulant dans le grand port du Ponant le 18 novembre 1954, Scarabée est admis au service actif le 15 février 1955 et affecté provisoirement à la DP (Direction du Port) Brest.
La gabare alterne désormais les travaux portuaires et hauturiers (mise en place et retraits de filets, coffres, corps-morts, mouillages, balises, pontons…), la récupération ou le mouillage de cibles, mines, torpilles et autres engins nécessaires à l'entraînement des unités de l'Escadre de l'Atlantique. En juin 1955, dans le cadre de l'OTAN, Scarabée participe à l'opération Dranor consistant à préparer la pose d'un câble sous-marin entre la France et les Pays-Bas. Navire de commandement du groupe Hollande, il se trouve à la tête des dragueurs Achernar, Pollux, Sirius, Arcturus, Rigel, Orion, Castor, Cassiopée, Véga et Protion. A la fin de l'année 1955, la gabare rejoint Toulon et une autre unité du même type, Criquet. Scarabée exerce désormais en Méditerranée les missions précédemment accomplies en Atlantique. Les années 60 sont dominées par la montée en puissance du programme de dissuasion nucléaire qui voit son aboutissement avec l'entrée en service du Redoutable le 1er décembre 1971. Tous les arsenaux de la marine étant associés à ce programme, Toulon est notamment responsable du système d'éjection des missiles balistiques en plongée. Un caisson immergeable, Némo, est développé à cet effet et participe à de multiples campagnes d'essais au large de Toulon. Un navire étant nécessaire pour le suivi et le soutien des essais, Scarabée est désigné comme unité support. A cet effet, une importante refonte réalisée en 1964 modifie profondément sa silhouette avec notamment la construction d'un local scientifique sur le toit de l'abri de navigation et d'un local à plongeurs au-dessus des treuils arrières. En dehors des périodes consacrées aux expérimentations, la gabare accomplit ses traditionnelles missions au sein de la DP Toulon. L'entretien et le contrôle des mouillages en Océan Indien ou les carénages réalisés par l'arsenal de Dakar permettent à Scarabée de sortir régulièrement de la Méditerranée. Au début des années 80, le remplacement des gabares de mer atteignant ou dépassant les 30 ans de service actif devient urgent. Après études menées par l'état-major de la marine, c'est l'affrètement de remorqueurs-ravitailleurs de plateformes pétrolières, Albacore pour Toulon, qui est retenu. Le 5 octobre 1987, Scarabée et Criquet appareillent pour une ultime escale à Tarente suivie de la traditionnelle sortie à la mer avec les anciens commandants. Les opérations de désarmement débutent le 1er novembre 1987 pour s'achever quelques semaines plus tard par la dernière cérémonie des couleurs correspondant à la mise en réserve spéciale. D'abord en attente à l'îlot Castigneau dans l'arsenal de Toulon, la gabare est rapidement transférée au cimetière marin du Brégaillon à proximité de La Seyne-sur-Mer. Vendus aux enchères, les ex-Scarabée et Criquet quittent définitivement Toulon le 21 mars 1990 en remorque vers un chantier de démolition.
Franck Dubey pour Net-Marine © 2011. Copie et usage : cf. droits d'utilisation. [Sommaire Net-Marine] |