Historique du sous-marin Argonaute


Les sous-marins Argonaute et Aréthuse en construction à Cherbourg (1957)
Construit à l'arsenal de Cherbourg sur les plans de l'ingénieur général du génie maritime Girousse, ce sous-marin alors désigné Q235, prend le nom d'Argonaute le 24 février 1954.

Les premiers éléments de coque épaisse, préfabriquée par tronçons sur des berceaux, moules d'assemblage sur lesquels était positionné les couples puis soudé le bordé, sont livrés fin 1954. Le terre-plein de fabrication étant occupé par les Narval, il est nécessaire d'utiliser une ancienne cale de construction pour constituer l'aire de préfabrication. Le lancement d'un dragueur ayant libéré l'une des lignes de tins de la cale de lancement n°4, les deux tranches avant de l'Argonaute y sont alors assemblées entre elles.

Le 29 juin 1957, l'ICGM2 J. Touffait raconte : " La date de lancement est fixé au 29 juin 1957. En fixant cette date, nous ignorions que le thermomètre de Cherbourg battrait un record local ce jour là, au point de modifier la consistance des graisses minérales utilisées pour le lancement, et de provoquer une légère hésitation au départ du bâtiment qui sembla se décider un peu à regret à quitter sa cale de lancement.
Le lieutenant de vaisseau Alleaume, désigné pour prendre le commandement du sous-marin était venu rejoindre le noyau d'équipage qui, avec l'ingénieur-mécanicien Thomas, suivait les travaux d'achèvement et s'initiait à la conduite des matériels. Ce fut l'époque où l'on vit s'installer à bord des équipes toujours plus nombreuses, et le chef de chantier, l'IDT Deloeuvre, devait faire preuve de toute sa diplomatie pour arbitrer les conflits naissants entre les diverses spécialités du chantier, dont aucune ne voulait supporter la responsabilité d'un retard
 ".


Vue des tubes lance-torpilles du poste avant.

Le 7 février 1958, une première plongée statique au centre du bassin Napoléon III marque un moment important. Les essais se suivent à un rythme rapide : 20, 21, 22 février : essais d'endurance du moteur électrique de propulsion ; 27, 28 février, 3, 4 mars : essais en propulsion schnorchel ; 20 mars : plongée à l'immersion maximum ; 22 mars : essais à puissance maximum en plongée. Puis, après la période de visite et de démontages, consacrée également à l'achèvement des installations d'armes et à une nouvelle série d'essais d'équipements et de tubes lance-torpilles à la mer (17, 18 et 20 juin). Le 3 juillet 1958, son appareil moteur est recetté. De nouveaux essais à la mer ont lieu les 8, 9 et 12 juillet. La commission supérieure d'armement se réunit à Cherbourg le 29 juillet 1958. Le 31 juillet 1958, l'Argonaute quitte Cherbourg pour sa croisière d'endurance (LV Alleaume) avec escale à Lisbonne (9 au 12 août) puis Oran (15 au 18 août). Les traversées se font entièrement en plongée.

Le 22 août 1958, il rallie Toulon, et est affecté à la 1ère escadrille de sous-marins (ESM), qui deviendra peu après l'escadrille de la Méditerranée (ESMED). L'Argonaute est admis au service actif le 23 octobre 1958. Il est peu après affecté au GSM 11 de Mers el-Kébir. Jusqu'à 1962, il effectue la surveillance des côtes durant la guerre d'Algérie. Mis à part ces quelques opérations, il n'a pas eu l'occasion de participer à des engagements réels.


Le central opérations du sous-marin Argonaute.
Le 14 juin 1959, il participe à la revue navale à Oran-Mers el-Kébir. Les sous-marins Aréthuse et Argonaute encadrent le Colbert, bâtiment-amiral, pendant toute l'inspection, sous les yeux de monsieur Pierre Guillaumat, ministre des Armées, et l'amiral Henry Nomy, chef d'état-major général de la marine.

En 1963, il est affecté à la 1ère ESM à Toulon. Le 1er juin 1963, il fait escale à Port Vendres.

Le 11 février 1975, à l'occasion du 16e anniversaire de l'entrée en service de l'Aréthuse, bâtiment tête de série, les quatre sous-marins de chasse, Ariane, Argonaute, Aréthuse et Amazone, sont réunis pour une photo de famille exceptionnelle à la mer au large de Toulon.

Le 20 juillet 1975, l'escadrille des sous-marins de la Méditerranée, armée de quatre sous-marins de type Aréthuse et de sept sous-marins type Daphné, ouvre ses portes exceptionnellement à plus de 10 000 toulonnais et vacanciers. Les sous-marins Flore, Diane, Vénus, Doris, Amazone, Argonaute sont ouverts au public.

En mai 1978, les sous-marins Amazone et Argonaute font une escale commune à La Maddalena (Sardaigne).

Le 14 juillet 1982, au retour de sa participation à la revue navale, l'Argonaute termine sa carrière à la mer au cours d'une brève et émouvante cérémonie. Devant une délégation des sous-marins de l'escadrille de la Méditerranée.


Le sous-marin Argonaute à la Cité des Sciences (Paris - juillet 2000)
Mis en réserve spéciale le 31 juillet 1982, jour de la dernière rentrée des couleurs, l'Argonaute aura cumulé 2147 jours de mer, 32700 heures en plongée et 210400 milles nautiques soit dix fois le tour de la Terre.

Un projet de sauvegarde se fait jour, et l'état-major de la marine accepte de sursoir à la condamnation du sous-marin. En décembre 1984, le ministre de la defense, Charles Hernu, décide de le donner à l'association des " Amis du musée de la mer pour l'Atlantique ". La Cité des sciences de La Villette étant intéressé, on étudia la possibilité de le transporter par voie fluviale jusqu'à Paris. A la fin 1988, la décision de l'installer à La Villette est arrêtée. L'investissement nécessitera 10 millions de francs, et demandé 40 000 heures de travail sous la direction de l'ingénieur Picollet, car amener un sous-marin, même petit (400 tonnes pour 50 mètres), jusqu'au coeur de la capitale, n'est pas chose facile.

Le 21 août 1989, une barge remorquée depuis Dunkerque et longue de 94 mètres est immergée dans une des darses de l'arsenal. Le sous-marin est positionné sur un berceau de cette plate-forme, puis on relève la barge.
La barge et le bâtiment quitte Toulon le 24 août et arrive au Havre le 13 septembre par un remorqueur de la société des Abeilles. Remontant la Seine, l'Argonaute arrive le 22 septembre à Genevilliers où l'on adjoint des flotteurs (une douzaine de ballons) pour lui procurer un tirant d'eau acceptable (3 mètres). Remorqué en Seine jusqu'à l'entrée du canal St Denis, le passage du canal St Martin s'effectue le 25 septembre.

L'opération la plus délicate commence car l'Argonaute ne passe pas sous les ponts et touche le fond du canal. Pour diminuer son tirant d'air, le kiosque avait été découpé au préalable à Toulon. Le transit par les 7 écluses du canal St Denis sera assez spectaculaire, mais moins que le hissage à terre à La Villette. Car comment passer un sous-marin de 400 tonnes du canal à la fosse creusée pour le recevoir ? IL fallut installer deux énormes bigues sur le quai, puis après l'avoir levé hors de l'eau, le déposer sur un chariot comprenant 96 roues (10 octobre). Après un roulage sur 400 mètres, le matériel de levage le dépose définitivement sur les deux blocs de béton.

Net-Marine © 2007. Remerciements Patrick Du Cheyron, Serge Pelois, Serge Le Coustour. Copie et usage : cf. droits d'utilisation. Vous souhaitez compléter cet historique (activité, escales, anecdotes, photos etc...) ? Ecrivez nous.


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