L'histoire de la flottille 31 F (1956-1985)

1956 : Le LV Derlot, chef d'un détachement de 3 H21C

1- L'Algérie

A peine la guerre d'Indochine terminée, la France va se trouver engagée dans le conflit d'Algérie. Afin de faire face aux exigences du moment et de lutter contre la rébellion naissante, le gouvernement français envoie des renforts. En outre, les Etats-majors décident de changer le style de combat, de type de combattants et d'adopter d'autres matériels, principalement en moyens de transport. C'est ainsi que l'on se tourne vers les appareils à voilure tournante.


Trois H21C en patrouille dans le sud Constantinois (1957)
Déjà utilisé en Indochine, mais exclusivement lors de missions à vocation humanitaire, l'hélicoptère va acquérir en Algérie ses lettres de noblesse.

Depuis début 1952, des hélicoptères Sikorsky S51, puis Piasecki Hup2, sont mis en service à bord des porte-avions pour la sécurité des mouvements d'aviation. Leurs activités s'étendent ensuite aux missions de liaison et d'évacuation sanitaire.

L'insurrection algérienne décide la Marine, en juin 1955, à envoyer un détachement de Sikorsky S55 de la 10S. Ce détachement est inclus dans le Groupement Hélicoptères n° 2, creuset où se mélangent des S55 de l'ALAT, de l'Aéronautique Navale et de l'Armée de l'Air.

Le 4 juin 1956, le lieutenant de vaisseauDerlot est désigné comme chef d'un détachement de 3 Vertol H21C "Banane", prêtés par l'ALAT, qui rallie Sétif le 7 juin, en relève des 2 S55 de la 10S, rentrés à Saint-Raphaël.


Embarquement de commandos à bord d'un H21C "Banane" (1957).
Jusqu'au 31 juillet, le personnel suivra un entraînement intensif sur les Bananes de l'ALAT (AA 148, AD 151, AE 152, AF 153 et AG 154).

Le 1er août 1956, la Marine crée, à partir de ce détachement, la première flottille d'hélicoptères, la 31F. Placée sous le commandement du lieutenant de vaisseau Bally, elle est officiellement affectée à la base d'Alger-Maison Blanche, mais en fait, elle stationne déjà à Sétif.

Elle comprend 7 officiers dont 6 pilotes, 39 officiers mariniers dont 22 volants, 35 quartier-maîtres et matelots.

Elle choisit comme emblème un Pégase blanc sur Croix d'Agadès. La raison de ce choix est simple : un cheval ailé, symbole que les américains ont choisi pour leurs propres H21, surnommés "work-horse" (cheval de trait); une Croix d'Agadès, parce que la flottille a vu le jour en Afrique du Nord.


Obsèques des LV Domergue, MT Lay et le SM Cré

En deux mois, les 3 appareils armant la flottille vont effectuer 600 heures de vol en transportant 6000 hommes et 40 tonnes de fret.

Le 25 janvier 1957 à la tombée de la nuit, le 31F-5, lors d'une EVASAN dangereuse dans le Djebal Tebak, est pris sous le feu d'armes automatiques fellaghas et s'écrase.

Le lieutenant de vaisseau Domergue (officier en second), le maître pilote Lay et le second-maître mécanicien Cré sont tués sur le coup. Seul le quartier-maître Balcon, grièvement blessé, sera récupéré par les légionnaires.

Le 3 avril 1957, le 31F-6, piloté par l'enseigne de vaisseau Liard et le second-maître Maraval, est touché par le tir des rebelles lors d'un posé. C'est le crash.


Le 3 avril 1957, le 31F-6 est touché par le tir des rebelles lors d'un posé. C'est le crash.
L'équipage s'en sort avec quelques contusions. Voyant l'équipage en difficulté, et malgré les tirs toujours intenses, l'officier des équipages Gavaud et le second-maître Hériaud réussissent à poser leur appareil, le 31F-4, sur la DZ et récupèrent leurs camarades. Les jours suivants, on essaiera de récupérer en sling le 31F-6, en vain.

Le ler juillet 1957, la 31 F déclare un important bilan d'activités : 1652 heures de vol, en 490 missions, transport de 16982 passagers, dont 142 blessés, transport de 94310 kg de fret.

Le 27 juin 1957, le lieutenant de vaisseauMichel remplace le Lieutenant de VaisseauBally comme commandant intérimaire de la flottille, commandement qu'il passe le 17 septembre au lieutenant de vaisseauBabot.

Le lieutenant de vaisseau Babot, meneur d'hommes par excellence, va imposer un style nouveau. Deux années de forcing durant lesquelles la 31F effectue 6146 heures de vol dont 5373 en 8566 missions opérationnelles, transportant 57560 commandos et 169 tonnes de fret.


La flottille 31F en juillet 1957

Embarquement de commandos à Bou Saïda (1958)
Le 20 décembre 1957, la 31F reçoit l'ordre de plier bagages et de mettre le cap sur l'Oranie, sa future base devant être Sidi Bel Abbès.

Entre-temps, le lieutenant de vaisseau Babot a l'idée de convertir un hélicoptère en bombardier. Il fait installer un lance-bombes pouvant supporter 5 bombes de 250 livres. Deux bananes sont ainsi modifiés. Mais malgré des résultats intéressants, ce projet n'est pas accepté par les autorités supérieures.

Le 17 février 1958, un détachement se pose à Bir-el-Ater, près de la frontière tunisienne, et y nomadise, jusqu'au 6 juillet.

Jusqu'en avril 1959, la flottille participe de façon soutenue à un grand nombre d'opérations, malgré une période de révision un peu plus poussée début 1959.

En avril et en mai, la 31F quitte temporairement Sidi-bel-Abbès et se retrouve basée sur le terrain de Tiaret-bou-Chérif, participant ainsi à l'implantation progressive de Zone Opérationnelle de l'Atlas Saharien dans les secteurs d'Aflou et Geryville.

Début juin, une nouvelle période, de révision est entreprise. Malgré ces efforts, la 31F n'a récupéré, en août 1959, qu'une disponibilité de 50%, ce qui n'empêche pas les 6 Bananes d'effectuer 245 heures en 15 jours, grâce au travail acharné des mécaniciens. Mais à partir de cette date, les opérations commencent à ralentir.


1959 : Le LV Angers, commandant la flottille 31F

Le 26 septembre, le lieutenant de vaisseauAnger, déjà présent à la flottille, prend le commandement de la 31F. Quant au capitaine de corvette Babot, il prend celui du GHAN 1. Changement de commandement qui va être suivi d'une période de transformation : vu l'état d'usure avancé des Banane, le commandement a commencé à les rendre à l'ALAT et à les remplacer progressivement par des HSS1.

Octobre 1959 : La disponibilité n'est que de 3 appareils. Mais le 10 novembre dans l'après-midi, la 31F passe le cap des 10000 heures de vol.

Janvier 1960 : La flottille, continue sa transformation sur HSS1. Trois appareils sont arrivés de métropole. L'un d'eux est opérationnel en fin de mois.

En mars 1960, la 31 quitte Sidi-bel-Abbes pour s'installer à la BPAN Lartigue. Elle possède alors 4 HSS et 2 H21C.

Le 1er avril, le nombre de HSS étant suffisant pour les opérations dans le Sud Oranais, elle rend ses H21C à l'ALAT. Quelques chiffres (éloquents) sur les services aériens des Banane de la 31F, au cours des 4 années passées : 10759 heures de vol dont 8974 en opérations, 81828 commandos et 8327 passagers transportés, 685 blessés évacués, 406 tonnes de fret, 14 appareils touchés par la DCA, 3 appareils abattus, 5 appareils détruits (dont 3 par accident), 3 morts.


1961 : Obsèques des LV Castaignos, EV Baudoin, SM Baurin et SM Blanchard
Dès lors, la flottille met en oeuvre les 4 HSS dont 1 armé de 2 canons MG151 de 20 mm, en formant un Détachement d'Intervention Héliporté (DIH) : groupe d'intervention constitué d'un hélicoptère-canon et de plusieurs hélicoptères de transport d'assaut. Certains de ces pilotes continuent à s'entraîner avec les équipages des deux formations du GHAN.

En juillet, elle complète le DIH de la 32F à Tiaret. Le 27 juillet, un cinquième HSS arrive. Ce n'est qu'en août qu'arriveront 3 nouveaux appareils, ce qui mène la disponibilité à 8 HSS. En septembre et octobre, elle exécute plusieurs DIH, à Géryville, Bou Semghoun et Flou. Cependant, les activités opérationnelles, comparées à celles du début de l'année, sont en nette régression.

1961 : La 31F forme de nombreux détachements à Thiersville et Aflou. Le 17 janvier, le 31F-6, hélicoptère-canon, intervient près de Berthelot en appui feu. Surpris par des fellaghas lors d'une passe de reconnaissance à vue, un feu nourri et concentré atteint l'appareil qui explose et s'écrase au sol. L'équipage (LV Castaignos, EV Baudoin, SM Baurin, SM Blanchard) est tué sur le coup.

En fait, une des caisses de munitions a dû être touchée à travers le plancher par le tir ennemi, faisant exploser l'ensemble de l'hélicoptère. La décision est donc prise de poser des plaques de blindage pour protéger les munitions; surcharge de poids qui impose la suppression du canon arrière.

Le 31 janvier, le 31F-2 est touché alors qu'il effectue une EVASAN au plus près des rebelles. Le mécanicien de bord est légèrement blessé.

Le 21 avril, le "putsch", mouvement insurrectionnel contre la politique d'abandon, éclate à Alger mais échoue complètement. Depuis, le rythme des opérations est encore assez soutenu, mais il est visible que l'ensemble des militaires a perdu la foi.


1961 : Le LV Farand, commandant la flottille 31F

Le ler juillet 1961, le lieutenant de vaisseauFarand prend le commandement de la 31F. Les activités mènent les 12 HSS dans les secteurs du Telagh et du Kreider, mais les grandes opérations d'antan sont pour ainsi dire terminées.

Le 28 août 1961, le lieutenant de vaisseauVerdery, avec un détachement de 5 HSS, quitte la Base de Lartigue pour rallier Saint-Mandrier, nouvelle affectation de la 31F.

La flottille et son Commandant, avec les 7 HSS restant, quittent définitivement Lartigue et l'Algérie le 2 septembre. Créée dans la tourmente, la 31F peut s'enorgueillir des succès remportés dans la lutte contre la rébellion algérienne au cours de ses 17000 heures de vol dont 14000 en opérations.

2.- La lutte anti-sous-marine et l'HSS

La 31F ainsi rapatriée change de visage. La guerre d'Algérie, bien que toujours présente, ne la concerne plus. Conservant des flottilles d'HSS "assaut" en Afrique du Nord, la Marine va utiliser la 31F, alors seule flottille d'hélicoptères en métropole, à des fins plus navales. Mais, faisons un retour dans le passé.

1957 : Pendant que les hélicoptères sont engagés, en Algérie, on pense en métropole à d'autres usages que l'assaut. L'amiral d'escadre demande que soit constituée à Saint-Mandrier une section de 4 hélicoptères ASM (lutte AntiSous-Marine) qui embarqueraient à bord du porte-avions Dixmude pour les sorties d'escadre et les stages du Groupe d'Action ASM. Le département refuse, mais annonce qu'il y aura, probablement, une flottille d'hélicoptères de dragages à Brest.


1961 : Premiers embarquement sur porte-avions
On envisage l'implantation à Saint-Mandrier d'une école de détecteurs ASM volants, qui serait précédée par un groupe d'étude de lutte ASM disposant de 3 HSS. Le seul obstacle à l'étude de ce groupe d'étude est le manque ... de cuve sonar.

La lutte anti-sous-marine est expérimentée sur hélicoptères depuis début 1957, à la 20S : d'abord sur des S55, puis en juin sur 5 HSS, tous ces hélicoptères étant équipés de sonar AQS4, torpilles MK43 et grenades MK54 (armes ASM pourvues en nombre réduit). Ce matériel, amovible, a été acheté aux États-Unis, car rien n'existe encore en France. La version "ASM" est réversible en "cargo"; une version "dragage" est également à l'essai, mais ne sera pas retenue, par manque de puissance des machines.

Une partie des HSS va être modifiée en version assaut en 1958, dans les ateliers de Cuers, afin de remplacer momentanément les Bananes vieillissants engagés dans le conflit d'Algérie; conflit qui, on l'espère, ne devrait pas s'éterniser davantage.

Le 31 août 1961 paraît la décision 371 EMG/Aéro d'affecter la 31F à Saint-Mandrier. Elle dépend dès lors de l'Aviation Embarquée. La flottille, habituée aux déploiements rapides dans le Djebel, arrivera ... le lendemain, avec ses 12 HSS.

C'est au lieutenant de vaisseauFarand, commandant la flottille, mais aussi ex-pilote de la 20S en 1957, que reviendra donc la charge de transformer la 31F en flottille ASM.


1963 : Le LV Verdery, commandant la flottille 31F
Six des HSS qui reviennent d'Algérie, où ils ont souffert du climat et des conditions d'emploi, sont envoyés à Cuers pour une révision générale et retrouver leur version d'origine. Ils sont remplacés par 6 HSS de la 20S déjà gréés en ASM. Une vingtaine de détecteurs ASM de bord et quelques pilotes viennent également de la 20S.

L'apprentissage démarre très fort, et la flottille peut être considérée comme opérationnelle moins de 6 mois plus tard. Les doctrines d'emploi et procédures sont les mêmes que celles utilisées par les Américains, qui les ont mises au point.

Les missions qui se dessinent comprennent essentiellement des HELI-CASEX, en coopération avec des bâtiments français ou inter-alliés; quelques sauvetages en mer; des vols d'entraînement classiques; très peu de vols de nuit.

Le premier HELI-CASEX a lieu le 20 septembre 1961, et le 1er embarquement sur porte-avions le 3 octobre, moins d'un mois après le retour en métropole, sur l'Arromanches. Les embarquements sur porte-avions (Arromanches, Clemenceau puis Foch) se suivront nombreux. Ils serviront dans les premiers temps à découvrir les porte-avions (mise en oeuvre, appontages, etc), puis à s'exercer exclusivement à l'ASM.


1966 : Départ sur le Foch vers le Pacifique
Les HSS se montrent d'ailleurs fort utiles lors des exercices en coopération avec les escorteurs, parce que ceux-ci, équipés de sonars à courte portée, ont des possibilités de détection très limitées.

Le lieutenant de vaisseauVerdery prend le commandement de la flottille le 20 mai 1963. Elle possède alors 12 HSS et pratique intensivement l'ASM. Des campagnes et des essais ASM se font d'ailleurs régulièrement en Bretagne pendant 3 semaines au printemps et en automne, en coopération avec la 32F et l'Escadre Légère, par détachements de 4 à 6 HSS. Elles se poursuivront quand la 32F sera affectée en Bretagne, et jusqu' à ce qu'elle soit transformée sur Super-Frelon en 1972.


1965 : Le LV Crenn, commandant la flottille 31F

En 1965, la flottille, commandée depuis le 18 janvier par le lieutenant de vaisseauCrenn, oublie un peu ses sonars et promène un filet de même longueur que les câbles sonar. Elle doit en effet prochainement effectuer une campagne au Centre d'Essais du Pacifique pour repêcher des engins spéciaux.

Le 1er janvier 1966, se constitue le Groupe d'Hélicoptères Occasionnel du Pacifique, qui réunit la 31F et une majeure partie de la 23S. Le 4 mars, le GHOP embarque sous les ordres d'ALGROUPA (futur ALPA) sur le Foch, vers le Pacifique. Sa mission principale devient le repêchage "chalutage" des têtes d'engins de prélèvement après tir nucléaire, à laquelle se rajoutent des missions de transport, de liaison, plus quelques petits exercices ASM (seuls 3 sonars ont été emmenés, pour garder le contact avec l'ASM).


1966 : Un HSS en exercice d'hélitreuillage depuis le le BSM Rhin.
De retour à Saint-Mandrier au Nouvel An, la flottille prend peu après pour commandant le lieutenant de vaisseauSassolas, le 24 janvier 1967. Ce dernier a la lourde tâche de lui faire à nouveau pratiquer l'ASM ; d'ailleurs pas pour longtemps, car il est question de repartir dans un an vers le Pacifique ... ce qui ne déplaît à personne. La 31F continue donc à chaluter, en faisant ce qu'il faut de sonar pour ne pas trop se faire remarquer.

La flottille quitte, une nouvelle fois, Saint-Mandrier pour l'année entière. Elle est affectée le 1er janvier 1968 au Clemenceau et au Groupe ALFA, qui s'en retourne au Pacifique pour de nouvelles expérimentations nucléaires.


1967 : Le LV Sassolas, commandant la flottille 31F

Dès son retour à Saint-Mandrier, le 12 décembre, fort de leur entraînement en héliportage au CEP, le commandant propose de faire de sa flottille une flottille mixte, assaut et ASM. Ce projet n'est pas retenu par les autorités supérieures, et la 31F doit reprendre son entraînement en ASM.

Depuis le retour du CEP, les sonars AQS4 sont progressivement remplacés par des DUAV1, sonars français plus performants. La torpille Mk44 fait son apparition sur HSS et les moteurs sont modifiés pour acquérir plus de répondant et de fiabilité.

Cependant, lors de sa prise de commandement le 5 février 1969. le lieutenant de vaisseauBouvet constate que l'équipement de ses appareils n'est pas encore totalement modifié (sonars, moteurs, HSS non munis de lance-torpilles Mk44). Il se trouve également confronté à vive insuffisance numérique en pilotes, et la question se pose alors de savoir si, compte tenu des besoins croissants en pilotes d'hélicoptères, il faut continuer à recourir à un recrutement pallialif parmi les pilotes d'avions, trop habitués aux voilures fixes.


1969 : Le LV Bouvet, commandant la flottille 31F

Les HSS sont dans leur dixième année, et corrosion et criques font leur apparition; phénomène normal, compte tenu du vieillissement du matériel. Les incidents en vol se font alors de plus en plus fréquents. Ils sont dus principalement à des défaillances moteur qui se manifestent par de forts claquements, pertes de puissance, fumées moteur, nécesssitant des retours en urgence, ou plus précipitamment, des posés en campagne ou des amerrissages forcés. Fort heureusement, malgré le nombre important de ces posés forcés, la 31F/HSS n'aura à déplorer aucune perte en vie humaine.


Au cours d'un entraînement au treuillage en rade de Toulon, le 150 "E" amerrit à la suite d'une rupture de tête de bielle.
Ainsi, le 28 mai 1969, alors qu'il transitait avec 3 autres HSS vers un CASEX, le 639 "L" (PM Sabre, MT Giftard, PM Suavet, PM Chevillard) émet un (classique?) fort claquement moteur qui incite l'équipage à se dérouter vers la terre la plus proche (Carqueiranne). Mais, en proie à de violents à-coups et des variations de puissance, la décision est prise d'amerrir. Autorotation, reprise moteur au ras des flots, stationnaire inespéré, amerrissage, évacuation sans incident. L'épave se maintient en surface une trentaine de secondes, queue en l'air, puis coule par faibles fonds. Repêchage, puis expertise à la conclusion évidente : défaillance moteur.

Cet accident, premier de la série qui va suivre jusqu'à la réforme des HSS en 1979, met en évidence la nécessité d'équiper au plus vite les appareils en système de flottabilité de secours. Une décision ministérielle est d'ailleurs prise en novembre 1970, prévoyant que tous les HSS devront être équipés de flottabilités de secours, consistant en 2 ballonnets gonflables montés sur les moyeux des roues du train principal et un ballon gonflé en permanence dans la poutre de queue.

Le lieutenant de vaisseauRouland prend le commandernent de la flottille le 1er février 1971. La 31F continue à parfaire son aptitude ASM.


1972 : Le LV Chassin, commandant la flottille 31F
Le 20 novembre 1972, les flottabilités de secours vont donner la mesure de leur efficacité : au cours d'un entraînement au treuillage en rade de Toulon, le 150 "E" (Godin, Isambard, Owsianka, Floch) amerrit à la suite d'une rupture de tête de bielle. Rapidement repêché, l'appareil pourra être réparé et remis en service.

Le lieutenant de vaisseauChassin prend le commandement de la flottille le 4 septembre 1972. Seuls, 7 des 11 HSS sont alors équipés de flottabilités. La livraison du reliquat doit être achevée pour fin 1974.

1973 : Crise économique mondiale, due à l'embargo sur les produits pétroliers, qui se répercute à tous les échelons. L'allocation annuelle en carburant est réduite de façon draconienne, de même que le nombre de jours d'embarquement.


1976 : Un HSS sur la BAN Aspretto.

Le lieutenant de vaisseauLeygonie prend le commandement de la flottille le 27 mai 1974.

L'ensemble de la flottille rejoint Brest et embarque sur le Foch du 5 novembre au 24 décembre 1974, pour une mise en place à Fort-de-France et soutien logistique à l'occasion de la rencontre entre les présidents Giscard d'Estaing et Ford.

Le 29 août 1975, en transit vers un CASEX à 3 HSS, le HSS 136 "L" (LV Ginhoux, SM Briffaut, MT Orsatelli, SM Chatelus) casse une tête de bielle et se retrouve à l'eau. La flottabilité arrière se crève au bout de 20 minutes, mais l'appareil peut être repêché 5 heures plus tard. Il sera néanmoins condamné après expertise.

2 HSS sont affectés en renfort à la section Jeanne d'Arc, pour la durée de la campagne 1975-76, ce qui réduit le parc aérien (donc le nombre de missions) à 8 HSS.

Le 23 janvier 1976, double fête pour le LV Leygonie qui apprend qu'il vient d'obtenir son quatrième galon et qui passe sa 4000ème heure de vol.

Le 6 février 1976, le 453 "A" (LT RN Wyman, EV1 Gernigon, MT Tillos, SM Porcher) est contraint d'amerrir à la suite d'une défaillance moteur. Les conditions météo sont difficiles, et la flottabilité droite se crève. L'appareil se renverse 3/4 dos mais se maintient en surface. L'épave sera coulée à la mitrailleuse 2 heures plus tard par l'escorteur côtier Ardent.


1976 : Le LV Blainvillain, commandant la flottille 31F
Le lieutenant de vaisseauBlanvillain prend le commandement de la flottille le 8 juin 1976. L'entraînement se poursuit de manière intensive, dans la mesure des disponibilités. Mais les performances du matériel mis en oeuvre n'ont pas évolué parallèlement au matériel sous-marin qui lui est opposé, l'état-major misant sur l'arrivée future du WG13 Lynx. De ce fait, les capacités opérationnelles de la 31F ne sont qu'acceptables aux yeux de son commandant.

9 novembre 1977 : Un HSS amerrit suite à une défaillance moteur.

Le 21 février 1977, tragédie et gag font la paire. En retour de CASEX à 3 HSS, les 638 "K" (MP Godin, EV2 Leduc, MT Pellen, SM Candella) et 137 "S" (EV1 Huysmans, SM Ogue, LV Galmiche, MT Voisin) s'entre touchent en formation, mais réussissent à amerrir sans incident. Dans une noria de 6 hélicoptères SAR, un HSS de la 33F repêche Leduc et Candela, mais une perte de puissance le contraint à amerrir à son tour. Heureusement, bien que la flottabilité droite se soit crevée, la gauche reste gonflée, maintenant l'échappement hors de l'eau, ce qui permet au pilote de réussir miraculeusement à reprendre des tours et redécoller aussitôt ... sans son mécanicien de bord, qui avait précitament évacué l'aéronef en difficulté.

Finalement, chacun sera récupéré sain et sauf. Le "S" coulera lors de son remorquage vers Saint-Mandrier et le "K" sera réformé après expertise.

Toujours en 1977, le 9 novembre, au cours d'un CASEX à 2 HSS, le 132 "T" (EV1 Deroussen, MT Diot, MT Ragot, MT Chatelus) amerrit suite à une défaillance moteur. La flottabilité se gonfle mais se crève à droite. L'équipage évacue sans incident et l'appareil coule en 45 secondes par grands fonds.


1977 : Le LV Jamin, commandant la flottille 31F

Le commandant de la 31F décide de quitter la Marine et le 22 septembre, le lieutenant de vaisseau Jamin lui succède. Son temps de commandement est une. transition entre le règne des HSS et celui des WG13. L'état-major a en effet décidé de ne plus passer les HSS en visite du 3ème degré, et de les retirer progressivement du service, leur fin de carrière étant prévue pour l'été 1979.


16 mars 1978, le, 1005 "M" effectue son dernier vol avant la réforme, après 4720 heures de vol.

Le 16 mars 1978, le, 1005 "M" (PM Bon, SM Azelard, PM Gruais, SM Capitaine) effectue son dernier vol avant la réforme. Achevant sa brillante carrière sur un CASEX, noble mission, il aura effectué depuis son premier vol le 24 juin 1959, 4720 heures de vol au cours de ses 19 années de bons et loyaux services. Le 121 "Y" le suivra en juillet et terminera plus noblement au musée de l'Air du Bourget.

Les HSS de la 31F effectuent leur dernier détachement, en avril et en juin 1978, à Milan et Albenga (Italie).

2.- Les Lynx

La livraison à la Marine des hélicoptères WG13 Lynx Mk II débute le jeudi 28 septembre 1978, livraison qui se poursuivra au rythme de 2 par mois.

La tâche de transformer, avec formation initiale, les flottilles d'hélicoptères ASM, a été confiée au CEPA de Saint-Raphaël. Ainsi, du 4 septembre au 16 novembre, la moitié du personnel de la 31F, volants et techniciens, va effectuer ce stage de transformation à Saint-Raphaël, tandis que l'autre moitié continue à mettre en oeuvre les HSS à Saint-Mandrier.


1978 : Arrivée des premiers Lynx à Saint-Mandrier
Le 16 novembre 1978 a lieu la mise en service officielle WG13 Lynx Mk II. Le personnel nouvellement formé à Saint-Raphaël rejoint Saint-Mandrier. Le 1er Lynx de la 31F arrive le 5 décembre 1978. C'est le 263. Les 264 et 265 suivront les 14 et 27 décembre.

Dès lors, le personnel s'initie à ce nouveau système d'armes qu'est le Lynx et à sa mise en oeuvre. C'est ainsi que du 15 au 19 janvier 1979, les 3 premiers Lynx reçus par la 31F embarquent à bord du Foch avec leur commandant, le capitaine de corvetteJamin. Cet embarquement n'est qu'une phase d'adaptation à la mer. Les WG13 ne sont qu'en version ASF. Ils ne recevront d'ailleurs leur équipement ASM qu'un mois plus tard.

Ces essais sont renouvelés avec l'embarquement de 2 Lynx sur la corvette Georges Leygues, du 7 mai au 15 juin, ainsi qu'avec un détachement (destiné à la future 35F) de 2 Lynx, sur le porte-hélicoptères Jeanne d'Arc, du 18 au 30 mai.

Les entraînements se poursuivent dans tous les domaines. Le 22 mai 1979 a lieu le premier tir missile anti-navire filoguidé AS12 d'un WG13 de la 31F. Six jours plus tard est lancée la première torpille Mk46.


14 juillet 1979 : Les Lynx de la flottille 31F participent pour la première fois au défilé aérien au dessus de Paris.

Peu à peu la flottille reçoit de nouveaux Lynx, et en juin 1979, son parc aérien se monte à 8 WG13 et 5 HSS.

Entraînement ASM, entraînement armes, vérification des possibilités SAR et manoeuvres héliportées, les heures de vol s'accumulent : fin juin, aux 960 heures de formation initiale au CEPA, dispensées à 24 pilotes de la 31F, s'ajoutent 1420 heures sur Lynx dont 270 de nuit et dont 40 au cours de 21 CASEX.

Le 22 juin 1979, le Grand Livre d'Histoire tourne une page avec le dernier vol des HSS de la 31F. HSS qui n'auront pas la mort noble qu'ils auraient pu souhaiter, puisqu'ils seront abandonnés à leur triste sort sur une décharge à ferraille, déplumés de leur rotor, allégés de leur moteur, pauvres épaves disloquées qui font peine à voir. Ils ont volé plus de 60 000 heures pour leur ancienne flottille.


1979 : Le LV Bec, commandant la flottille 31F
Le 29 juin, le lieutenant de vaisseauBec succède au capitaine de corvette Jamin en prenant le commandement de la flottille. Les Lynx font leur apparition dans les présentations aériennes : défilé aérien au dessus de Paris le 14 juillet, largage de palmeurs lors de la revue navale de Cannes les 28 et 29 septembre.

A matériel nouveau, missions nouvelles. Le WG13 confirme sa vocation d'hélicoptère embarqué à bord des Bâtiments Porteurs d'Hélicoptères (BPH). L'organisation de la flottille s'en trouve modifiée : création le 17 juillet 1979 du détachement Georges Leygues (LV Pluvinet, LV Rivière), création le 22 octobre du 2ème détachement sur le Dupleix (LV Lebreton-Oliveau, MJR Lafay), détachements occasionnels sur frégate, porte-avions et pétroliers-ravitailleurs. Face à ces détachements est créé un noyau fixe, l'Échelon Arrière, qui devient leur support logistique et le creuset où les pilotes sont transformés, entraînés et qualifiés.


1979 : Exercice d'hélitreuillage avec un Lynx de la flottille 31F à partir de l'aviso-escorteur Commandant Rivière

Durant l'année 1980, les essais et expérimentations se poursuivent : homologation des plates-formes de poser des BPH, désignation d'objectifs trans-horizon, lunettes de vision nocturne, sauvegarde porte-avions, repêchage de torpilles.

La flottille, par le biais de ses détachements, participe aux grands exercices navals alliés et inter-alliés. Le WG13 débute ses activités de Service Public en participant aux évacuations sanitaires, aux opérations SAR, aux opérations de lutte anti-pollution et de surveillance d'épaves.

Le plan d'armement théorique de 8 appareils varie en pratique de 5 à 7 appareils suivant les disponibilités. Le 2 avril 1981 est prise la décision de stocker sous cocon 3 appareils - les 266, 270 et 274 - ce qui entraîne de fait une réduction du plan d'armement à 6 WG13.

Le 265 est le 1er Lynx à passer les 1000 heures de vol, le 17 juillet 1981. Il est, rappelons le, arrivé à la 31F le 27 décembre 1978.


1981 : Le CC Bazaucour, commandant la flottille 31F
Le 29 juillet 1981, le capitaine de corvetteBazaugour prend le commandement de la flottille.

Deux Lynx reviennent à la flottille, ramenant le plan d'armement à 8 appareils, pour pallier à la création future du 3ème détachement, celui du Montcalm (LV Cazenave, EV1 Bon), le ler janvier 1982.

Le 27 août 1981, le lieutenant de vaisseau Villedieu de Torcy, chef du détachement Georges Leygues, effectue le 1000ème appontage du bâtiment. Un an plus tard, le ler juin 1982, le capitaine de corvette Illien, commandant en second la flottille, effectue sa 1000ème heure de vol sur WG13.


1982 : Un Lynx à Thorame, Alpes de Haute-Provence.

La 31F, toujours par le biais de ses détachements, et outre les exercices navals, recommence à participer à des opérations à caractère militaire : escorte de la vedette iranienne Tabarzin prise en otage en août 1981, et surtout, début des missions de patrouille et d'assistance le long des côtes libanaises, dès le 11 juin 1982, missions au cours desquelles les Lynx seront amenés à se poser au coeur de Beyrouth, ville en guerre civile, à travers la mitraille incontrôlés des diverses forces en conflit.

C'est d'ailleurs au cours de ces opérations de temps de crise qu'on s'aperçoit que la peinture dorsale blanche, utile en temps de paix pour sa fonction anti-collision, le rend trop voyant et en fait une cible idéale. La décision est donc prise en 1982 de repeindre tout en gris l'ensemble des Lynx et Super-Frelon, sans modification des marques d'identification. Pendant les 3 années qui suivront, les Lynx participant aux opérations libanaises arboreront en sus, à la demande de ces autorités, une bande tricolore peinte en largeur au niveau du harpon.


1983 : Le CC Illien, commandant la flottille 31F
A la fois guerrier et mondain, le Lynx reste présent dans les présentations aériennes : défilé aérien le 14 juillet 1982 à l'occasion de la revue navale de Toulon et transport du Président de la République et des plus hautes autorités de l'État ; "one-helicopter-show" devant ses grands anciens lors du 50ème anniversaire de la BAN Saint-Mandrier le 29 mai 1983.

La flottille fête sa 10000ème heure de Lynx le 21 juin 1983 avec le vol des LV Casati, EV1 Bon, PM Brunet sur le 623.

Le 2 septembre 1983, le capitaine de corvetteIllien prend le commandement de la flottille. Embarque également le ler officier britannique pilote de Lynx, le Lieutenant Commander (Royal Navy) Macmahon, qui deviendra vite une figure de proue.


1983 : Décès de 3 membres de la flottille 31F.

Le deuil frappe la flottille le 29 novembre 1983 lors du crash du 277 à 5 Km au large de Beyrouth. Le 277 effectuait un retour de nuit à très basse altitude, de Beyrouth vers le Dupleix, quand il a percuté la mer. L'EV1 Grilli, pilote, et le PM Owsianka, électronicien de bord, sont tués. Le PM Tanguy, chef de bord, est porté disparu. Une cérémonie commémorative a lieu à Saint-Mandrier le 5 décembre en présence du Chef d'État-Major de la Marine.

Le ler décembre 1983 est constitué un 4ème détachement, celui du Jean de Vienne (LV Lauer, LV Casati-Ollier).

Début 1984, la décision est prise de sortir de cocon les 3 Lynx stockés en 1981, pour pallier au nombre croissant de détachements. Sa dotation monte à 11 appareils, puis à 12 avec l'arrivée du nouveau WG13 Mk IV. Plus performant que le Mk II, le Mk IV apporte une nouvelle jeunesse au Lynx. Le 809, premier des Mk IV, arrive le 27 février 1984. 12 WG13 Mk IV doivent être livrés au cours des 18 mois suivants, et remplacer progressivement et définitivement les Mk II dont était dotée la flottille depuis 1978.


1985 : mise en service d'un simulateur de vol Lynx très performant.
Les performances accrues portent principalement sur l'augmentation de la puissance des moteurs, et quelques modifications techniques induisant une réduction du niveau sonore et vibratoire, donc une amélioration du confort en vol. Les missions ne changent pas, mais de nouvelles évaluations sont faites.

En septembre 1984, l'ensemble de la flottille quitte Saint-Mandrier pour un exercice d'escadre. Les détachements sont à bord de leur BPH et l'Échelon Arrière embarque sur le Foch et sur le pétrolier ravitailleur Meuse. Après 2 mois de mer et d'escales variées, la flottille retrouve Saint-Mandrier le 13 novembre.


1985 : Le CC Villedieu de Torcy, commandant la flottille 31F

Du 14 au 21 novembre 1984, un an après son crash, l'épave du 277, qui vient d'être localisée, est repêchée par 1285 m de fond. Au cours de ces opérations, la dépouille mortelle du MT Tanguy est retrouvée. Les obsèques sont célébrées le 28 novembre à Saint-Mandrier.

30 novembre 1984 : record battu, les 12 Lynx de la 31F sont mis en l'air pour un entraînement au défilé aérien.

Le 6 mars 1985, le lieutenant commander Macmahon fête sa 4000ème heure de vol dont 2000 sur Lynx, à bord du Clemenceau.

Le 27 avril, la 31F confirme sa vocation de formation opérationnelle avec la mise en service d'un simulateur de vol très performant, permettant tous les scénarios de vol, vécus ou probables.

Le 2 septembre 1985, le capitaine de corvetteVilledieu de Torcy prend le commandement de la 31F.

Deuxième partie : L'histoire de la flottille 31F (1985-2000) : Sauvetages en Méditerranée; la 31F dans la guerre du Golfe; Yougoslavie, Somalie, Erytrée : La 31F sur tous les fronts; les échanges franco-allemand s'intensifient...

(Net-Marine © 2008. Copie et usage : cf. droits d'utilisation. Sources : Historique de la flottille 31F par le LV Crépin et l'ASP Suire; "Hélicoptères et commandos-Marine en Algérie" par René Bail/ photos 31F/Marine nationale)


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