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Bonsoir,

Je cherche la date jusqu'à laquelle la tenue blanche de sortie, l'ancienne tenue n°20, a comporté le maillot rayé au lieu de la "coloniale". Après guerre, c'est évident, mais quand?
Dès 1959, la brochure MARINE NATIONALE éditée par le service Presse Information, donc officielle, illustrée par Jacques Courboulès, alors sous les drapeaux, et d'ailleurs sur les données du bureau Habillement de la direction centrale du Commissariat, montre le QM2 en tenue 45 avec la chemisette.
Qui a une référence en la matière?

Cordialement

Grâce à SL, j'ai ma réponse.
L'arrêté de 1954 sur le service à bord, dans son annexe XIV sur la composition des tenues de l'équipage, ordonne sous la vareuse blanche la chemisette exclusivement. Merci, SL.
Alors qu'à sa création en 1929, la chemisette "spéciale pour pays très chaud" était portée seule, ce premier texte après la fin de la guerre entérine vraisemblablement la pratique. Ceci traduit un changement de mentalité : jusque là, quelles que soit la température et l'humidité, à l'extérieur, tous les gradés avaient la casquette et la cravate et dans la plupart des cas le veston. Tout le monde avait chaud, mais il n'était pas question de paraître négligé sous l'uniforme.
L'arrêté de 1958 sur les uniformes et tenues des personnels militaires l'armée de mer ne fait évidemment que reprendre le port de la chemisette sous la vareuse blanche.
À noter que cet arrêté est le premier, depuis que la Marine existe, qui fixe les tenues pour tous les grades et corps dans un seul texte.
C'est corrélativement la première fois que les tenues des officiers ne sont pas déterminées par un acte du chef de l'État.

Bonjour,
Avant d'aller plus loin et essayer de résumer l'évolution de la tenue pour pays chaud des différentes catégories de personnels, deux précisions :
- l'arrêté relatif aux uniformes et tenues des personnels militaires de l'armée de mer ne date pas de 1958 mais de 1957 (arrêté n° 82 du 2 août 1957, bulletin officiel page 3401) mais il a effectivement été inclus dans le bulletin officiel méthodique n° 38 en 1958;

- ce n'est pas la première fois que les tenues des officiers ne sont pas déterminées par un acte du chef de l'Etat :

- le 22 janvier 1931 c'est bien un arrêté ministériel qui règle l'uniforme et les tenues des officiers et fonctionnaires des différents corps de l'armée de mer (bulletin officiel page 403);

- et avant cette date, par une subtilité juridique bien française, le décret du 11 juin 1923 (uniformes des officiers des différents corps de la marine) est abrogé le 24 août 1928 (abrogation signée G. Doumergue, bulletin officiel 1929, page 529) et immédiatement remplacé par un arrêté de la même date (signé G. Leygues, bulletin officiel 1929 page 530) qui reprend "le même texte que celui du décret du 11 juin 1923".

On notera que de nos jours, les uniformes et tenues ne font plus l'objet que d'une simple instruction signée du sous-chef d'état-major "Ressources humaines".
Cordialement SL

Bonjour,
Il n'est pas certain que l'arrêté de 1954 marque effectivement la fin du port du tricot rayé sous la vareuse blanche. Il n'est pas impossible qu'un autre texte ait été pris avant cette date pour introduire cette modification dans la composition de la tenue blanche (blanc complet). Si tel est le cas, ce texte qui reste à découvrir, n'a pu être publié qu'entre 1951 et 1954 comme le prouve la photographie ci-dessous (source : site Navsource.org).
Cordialement

Vous avez bien entendu raison pour les dates, mon cher SL. C'est donc vingt ans plus tôt que je ne le pensais, et en pleine paix, que la détermination des tenues des officiers revient au ministre. Ca reste pour moi lourd de sens : depuis Louis XIV, le chef de l'État manifestait que les officiers de vaisseau représentaient sa puissance sur les mers et en escale à l'étranger. Et en sept décennies, la décision est descendue à une simple instruction, même pas prise par le CEMM.

Au sujet des textes importants sur les tenues dans la Marine, voici quelques observations :
- la Ve République est adoptée par referendum le 5 octobre 1958; le dernier cabinet de la IVe, présidé par Charles De Gaulle, et chargé de l’élaboration d’une nouvelle constitution avait été formé le 1er juin à la suite des barricades d'Alger le 13 mai.
Le "Règlement sur les tenues du personnel militaire de l’Armée de Mer" datait du 27 mars, près de deux mois plus tôt, et six mois avant le changement de régime.
- la IIIe République se saborde par le vote des pleins pouvoirs législatifs, exécutifs et constitutionnels au maréchal Pétain, le 10 juillet 1940, deux semaines après l'armistice, et douze semaines après l'édition, le 1er avril, du BOM 38 UNIFORMES ET TENUES – OFFICIERS ET FONCTIONNAIRES DES DIFFÉRENTS CORPS DE L’ARMÉE DE MER, mis à jour de huit modificatifs depuis l'arrêté ministériel de1931, justement.
- l’Empire français est proclamé le 28 floréal an XII (18 mai 1804), mettant fin à la Révolution française; l'arrêté consulaire relatif au "vêtement uniforme que porteront les marins composant les équipages de la République" avait été pris le 5 mai.
- le Consulat est institué quant à lui le 20 brumaire an VII (9 novembre 1799)... en attendant les résultats d'un plébiscite à organiser; le règlement concernant l’uniforme des officiers militaires et des officiers d’administration de la marine et des colonies avait été pris par le Directoire le 19 fructidor an VII, soit le 5 juillet précédent
- la Convention nationale s'est déclarée dissoute et a cédé la place au Directoire le 4 brumaire an IV (26 octobre 1795); le décret sur l’organisation de la marine militaire (dont l’article XVII détermine la tenue des officiers) datait de ...la veille! Record absolu.
Doit-on conclure que c'est pour cette raison que ni Président de la République ni ministre de la Défense ne prennent plus le risque de signer un texte sur l'uniforme dans la Marine?
[A contrario , le décret impérial déterminant l’uniforme des divers corps de la Marine date du 29 janvier 1853, c'est 58 jours après le coup d'État du 2 décembre mettant fin à la IIe République, mais le nouveau modèle de bonnet de travail, qui étendra le rouge garance à l'ensemble de la houpette, sera défini le 21 février 1870, soit six mois avant l'effondrement du Second Empire ]

Bonne soirée à tous

Albert SARRAUT, le ministre de la marine militaire qui a signé le décret du 22 janvier 1931 à la place du Président, a été renversé le 27 suivant!
Banal sous la IIIe, direz-vous, et ça ne l'a pas empêché d'être deux fois encore ministre de la marine, dont une en tant que Président du Conseil.
Ce qui l'est moins, c'est qu'il a été déporté, et que son frère a été abattu par la Milice.
Quant au Président qui n'a pas signé, il a été assassiné trois mois et demi plus tard au Salon des écrivains combattants, lors d'une séance...de signatures, et il est mort sous les yeux de son capitaine de vaisseau d'ordonnance.

Le marin n'est pas superstitieux, de crainte de faire venir le malheur.

Bonsoir,
Une question au sujet de la photo ci dessus relative, je suppose car elle n'est pas très nette, à l'assassinat du Président :
Le capitaine de vaisseau d'ordonnance y figurant porte bien une épée et non un sabre, était-il chef de division ?
Cordialement
astum

Bonsoir ASTUM,

Ce CV est parfaitement réglementaire en portant une épée : tous les officiers de la Marine affectés à la maison militaire du Président de la République, quels que soient leur grade et leur corps ( officiers de Marine et commissaires; y-en-a t'il eu d'autres?), portent l'épée depuis ... le décret ministériel de janvier abondamment cité plus-haut.
Cette épée est identique à celle des amiraux et chefs de division, mais sans étoile sur le plateau, évidemment. Ce type assez rare se caractérise par le remplacement au pommeau de la "coquille marine" par un demi-foudre entouré d'éclairs.
Elle remplace à cette date la ceinture à raies ponceau dont parle Gervèse, qui l'a porté comme officier d'ordonnance du ministre.D'après lui, il était de règle de la racheter à son prédécesseur.

Impossible de voir si le CV porte sur son pantalon, de chaque bord deux bandes d'or (les mêmes que celles du pantalon de soirée), encadrant un passepoil de même, depuis le 11 janvier 1923, et qui est rarissime. Je n'en ai jamais vu. Sans doute ceux qui quittaient le poste décousaient-ils les bandes pour retrouver un effet portable.
Garde-t-on un falzar, quand l'épée, dont on ne peut rien faire avant d'avoir les étoiles, suffit comme souvenir?

Cordialement

Bonsoir à tous,
Merci TLN 23, j'avais complètement oublié les attributs spéciaux de ces officiers. Cette piqure de rappel m' a permis d'apprendre cette modification du pommeau de leur épée. Existe t il un document la réprésentant ?
Cordialement
astum

Bonsoir,
Pour information, extrait du décret du 13 mai 1902



Cordialement SL

Bonsoir
En effet la planche XIX de 1902 illustre bien les 3 catégories de coquilles d'épées :
- officiers généraux /
- hauts fonctionnaire, officiers attachés à la maison militaire du président etc
- officiers des services de la marine
Curieusement ces représentations ne sont pas reprises en totalité dans l'arrêté du 22 janvier 1931, de plus l'article 14 de ce dernier ne mentionne pas l'abandon de la ceinture pour la catégorie d'officiers qui nous intéresse. Modificatif ultérieur ?



Cordialement
astum

Bonsoir,
Quelques éléments montrant que des tenues mieux adaptées aux zones chaudes ont fait leur apparition bien avant la mise en service de l'arrêté sur le service à bord de 1954.

Une tenue spéciale pour les quartiers-maîtres et marins en service dans les pays très chauds est créée par la circulaire du 30 septembre 1925.
Cette tenue comporte une chemise blanche sans col et un pantalon blanc. Elle rentre dans la composition du sac des marins en service en mer Rouge, Indochine et Haut Yang-Tsé et doit faire l'objet d'une confection locale à l'initiative des bâtiments ou de la direction de l'intendance maritime en Indochine.
En 1929 la tenue spéciale est portée à bord et exceptionnellement à terre dans les conditions fixées par le commandement. Et si celui-ci le juge nécessaire, dans certains cas (travail de bureau), les officiers mariniers peuvent être autorisés à porter la chemisette.

Au fil des ans la tenue spéciale pour pays très chaud évolue. Selon la circulaire du 23 août 1939, lorsqu'elle est prise pour les sorties à terre ou les inspections elle comporte une chemisette blanche sans col, à manches courtes, un pantalon blanc, des chaussettes blanches et des souliers blancs. Avec cette tenue le port de la ceinture de flanelle est obligatoire après le coucher du soleil.
Le port de la tenue spéciale est également étendu à d'autres régions du globe (océan Indien, océan Pacifique, mers de Chine et du Japon, Sénégal, Levant, …).
Et surtout, selon cette circulaire, les officiers mariniers sont autorisés à porter une chemise blanche à manche courte, en tissu de coton croisé dans les mêmes conditions que celles fixées pour les quartiers-maîtres et marins.
Immédiatement une autre circulaire du 23 août 1939 modifie la composition du trousseau des officiers mariniers (circulaire du 10 juillet 1922) en y ajoutant trois chemisettes blanches pour pays très chauds et en précisant que cet article n'est pas délivré par le magasin d'habillement, les intéressés devant se le procurer directement dans le commerce.

Le 13 février 1940 la chemisette spéciale pour les officiers mariniers dans les pays très chauds fait l'objet d'une feuille additive au fascicule concernant la confection des effets d'habillement par les ateliers de l'intendance maritime. Cette feuille n'a malheureusement pas pu être retrouvée à Toulon mais à compter de cette date la chemisette doit être considérée comme un effet réglementaire, au moins pour les officiers mariniers. Et si les officiers mariniers sont autorisés à la porter il ne fait aucun doute que les officiers ont également opté pour le port de cet effet. Les clichés de l'époque en donnent de nombreux exemples.



Le capitaine de corvette Lancelot et deux de ses officiers à bord du sous-marin Béveziers en 1940.

On ignore encore à quelle date exacte la tenue avec chemisette blanche va pouvoir se substituer à la tenue avec veston et cravate mais la circulaire n° 2262 PM/2 du 28 mai 1948 nous apporte quelques éléments sur une réglementation qui avait déjà cours :

"Tenue pour pays très chauds
Officiers et officiers mariniers
Tenue de sortie :
Pas de changement à la tenue actuelle, chemise et short blancs, bas et souliers blancs.
Pour certaines cérémonies, le port du complet blanc peut être ordonné par le commandant supérieur.
…
Tenue pour pays chauds
Officiers et officiers mariniers
Tenue de sortie :
Complet blanc."

Certes on fait encore la différence entre pays chauds et pays très chauds, mais le besoin de confort est désormais bien pris en compte et ce n'est pas pour autant que l'on parait négligé.
Cdt SL