Histoire de la BAN Saint-Mandrier (1916-1925)


Le premier centre s'installe en plein coeur de Saint Mandrier. Trois hangars abritent des hydravions de reconnaissance.

Créée officiellement par un décret du 20 mars 1912, l'aviation maritime était encore à la veille de la grande guerre à ses premiers balbutiements. Personne ne la prenait très au sérieux et les esprits les plus ouverts, s'ils accordaient quelques valeur à l'aéroplane pour les missions d'éclairage et d'observation, ne lui en reconnaissaient aucune dans l'offensive. Le déroulement de la campagne lui permit de faire ses preuves et de prendre un essor considérable. Sur notre littoral furent créés des centres qui prirent une part active à la lutte anti-sous-marine. L'aviation maritime comptait en 1914 huit appareils mis en œuvre par 208 officiers et marins. A la fin de la guerre, elle disposait, par contre, de 1264 avions et hydravions, servis par 11000 officiers, officiers-mariniers ou sous-officiers et marins, opérant à partir de 36 centres d'aviation.

Saint Mandrier fut l'un de ces centres.

Le saviez vous ?
Les heures de vol de nuit étaient payées bien davantage que les heures de jour, et ce prix était multiplié par 2 si ces heures de nuit étaient effectuées hors de vue du centre. Ce n'est pas pour cela qu'il y eu beaucoup d'heures de vol de nuit… On les comprend ! Il n'y avait pas d'horizon artificiel !

L'installation
Le 1er août 1916, ce centre s'installe sur la place de la mairie, dans l'anse du creux Saint-Georges. Il est placé sous les ordres de l'enseigne de vaisseau de première classe Gabriel Fradin. Un débarcadère pour la mise à l'eau des appareils est construit au fond du port de Saint-Mandrier.
Au mois d'octobre commencent à arriver les premiers FBA 150ch (Franco-British Aviation). En novembre, l'effectif initial de douze appareils dont neuf armés passe à seize (12), puis à vingt-quatre (18) en juillet 1917. Trois hangars abritent des hydravions de reconnaissance biplaces CAMS et FBA. Un quatrième hangar, à l'emplacement du roulage de la base la plus récente, près de l'aubette, sert d'entrepôt pour les hydravions du creux Saint-Georges. Les communications entre le Centre et les hydravions sont assurées par pigeons voyageurs embarqués à bord des appareils dans des paniers d'osiers. Le pigeonnier de la base sert à la fois de PC radio et de tour de contrôle. Les hydravions sont fragiles et les pannes de moteur fréquentes. Le 24 août 1917, l'EV1 Fradin est remplacé par le lieutenant de vaisseau Samuel Fournié, puis le 15 juin 1919, par le lieutenant de vaisseau Louis Barthélémy de Saizieu.


Le Service Réparations aéronefs, plutot rustique... (1918).

Un événement mérite d'être relaté pendant cette période. Il s'agit de l'extraordinaire aventure de l'EV1 Jacques Langlet. Parti en reconnaissance avec le SM mécanicien observateur Dien, il fut contraint d'amerrir, suite à une panne moteur, le 2 juillet 1918 avec son hydravion FBA au sud du cap Couronne. Après avoir dérivé pendant 10 jours dans une mer démontée sans eau ni nourriture, ils échouent le 13 juillet sur une plage du golfe de Porto, en Corse.

Un premier désarmement
La paix revenue, on désarma presque tous les centres et l'on vendit, ou même brûla, les hydravions. La Marine se désintéressa alors de son aviation et la majeure partie des hommes furent remis au service général.


Saint-Mandrier n'échappe pas au démantèlement, les 3 hangars seront démontés en 1921.

Saint-Mandrier n'échappe pas au démantèlement. En 1921, plusieurs dépêches du Ministère de la Marine organisent la suppression du centre d'aviation maritime, qui est officiellement fermé le 12 avril 1921. Les 3 hangars sont démontés et les toits récupérés pour couvrir un hangar au Mourillon qui servira au logement des bois de l'arsenal. Les locaux qui ne sont pas laissés à la commune de La Seyne sont vendus aux Domaines, ainsi que la clôture du Centre. Les deux grues de 6 et 2 tonnes sont conservées par la Marine pour une utilisation ultérieure. Au Creux Saint-Georges, étaient restés là quelques FBA, comme des épaves inutiles. Le avaient rejoints des hydravions Donnet Denhaut et, seul de son genre, plus imposant, un triplan Tellier. Tous ces oiseaux morts pourrissaient lentement…

Que sont-ils devenus ? Laissons la parole à M. de Montjou, dans son rapport à la chambre des députés, en 1924 : "Ces escadrilles occupaient primitivement un excellent emplacement dans la rade même de Toulon, emplacement qui paraissaient désigné militairement parlant, car il était à proximité de Toulon et parce que, derrière une colline élevée, le centre était particulièrement bien protégé contre les bombardements. Au point de vue aviation, le creux Saint-Georges, dans le village de Saint-Mandrier était la perfection : le plan d'eau dont disposait le hydravions était admirable, il permettait le départ presque par tous les temps et l'aménagement aisé de grues ou de hangars flottants. Mais il paraît que les pêcheurs locaux réclamaient la disposition de leur port accaparé par les aviateurs, c'est du moins, la seule raison valable invoquée. On hésita pour loger les formations expulsées, entre les baie du Lazaret, qui aurait nécessité de fortes dépenses d'installations et paraît très éventée, et Berre, un peu loin, a t-il semblé, pour des escadrilles de défense côtière. On adopta finalement un troisième emplacement, sur la rade d'Hyères, et on les envoya au Palivestre. Elles y seront, on ne peut plus mal, car leurs envols seront souvent pénibles et leurs risques de bombardement toujours extrêmes".

Ainsi finit une époque de l'Aéronautique Navale et disparaît la première base de Saint-Mandrier.

(Sources : Carnets de marche de la BAN St Mandrier, texte du CF Queinnec, photos BAN St Mandrier, Jean-Michel Roche © Netmarine 2002)


[Sommaire BAN St Mandrier] . [Sommaire Net-Marine]