Hourtin : Un temps pour se souvenir...

(Par Bernard Timbal - Ex scientifique du contingent à Toulon, Nov. 1999 - Sept. 2000)

     Avant de rejoindre mon affectation de scientifique du contingent à Toulon, j'ai été parmi les derniers appelés à effectuer en novembre 1999 mes classes au CFM de Hourtin - Contaut (33). Quelques semaines plus tard, le Centre de Formation Maritime d'Hourtin fermait définitivement ses portes... Avec la fin de la conscription et du service militaire, une ultime page se tournait pour l'ancienne base aéronavale, peut-être la dernière de son chapitre militaire...

Petit retour nostalgique sur les lieux en janvier dernier : Hourtin, un temps pour se souvenir...

     Lorsque j'y suis retourné, je n'ai reconnu l'entrée du centre que grâce à une carte postale de cette époque...

Il faut dire que lors de mon bref passage à Hourtin, je n'ai franchi cette grille qu'une fois le jour de mon arrivée et une autre fois dans l'autre sens moins de 15 jours après...

 

Le Centre de Formation Maritime d'Hourtin n'est plus... Il n'y a plus sur la grille d'entrée qu'une discrète pancarte "Site Militaire d'Hourtin"; un peu comme si on avait arraché au centre ses épaulettes et décorations.

Signe des temps et de la professionnalisation de l'armée, son gardiennage n'est même plus assuré par des militaires mais par une société privée...

     J'ai été incorporé un mercredi 3 novembre gris et pluvieux. Je me souviens de l'arrivée à la gare de Bordeaux, du petit déjeuner pris dans un café en compagnie de mon frère aîné venu m'accompagner. Lui, dégustant tranquillement son café au lait, moi, dévisageant discrètement les autres jeunes assis aux tables voisines; reconnaissant parfois parmi eux, au petit sac qui les accompagnait, ou à l'ordre d'incorporation qu'ils tiraient de leurs poches de futurs compagnons de classes.

     Certains avaient dû venir de fort loin et avaient peut-être même passé la nuit à l'hôtel, ajoutant à l'appréhension de l'armée ce débarquement dans une ville inconnue. Ce n'était pas mon cas et l'armée avait au contraire fait irruption dans ma vie dans ce lieu familier qu'était la gare de Bordeaux théâtre de tant de sorties scolaires de mon enfance, retour de voyage ou accueil de proche ou d'amis.


 

     Le car pour Hourtin nous attendait au "dépose minute" où mes parents avaient l'habitude de me déposer le dimanche soir lorsque je rentrais par le train à Pau.

Lorsque j'y repasse, à présent, je revois toujours le car arrêté sur le trottoir, la foule des jeunes attendant d'y monter à l'appel de leur nom, et moi, parmi eux, au seuil de cette parenthèse qu'ouvraient le service militaire et la marine dans ma vie..."

     L'esprit humain a horreur du vide... Pour preuve; lorsqu'on se retrouve face à des lieux vides, les souvenirs et l'imagination viennent occuper l'espace laissé vacant par les hommes comme des herbes poussant dans les interstices du goudron...

 

     Hourtin devant fermer ses portes moins d'un mois après notre départ, le stand de tir, déjà, avait été démantelé peu avant notre arrivée si bien que de tout mon service, je n'ai jamais touché à une arme...

 

 

     Ce séjour à Hourtin s'apparentait déjà plus aux futures "Journée d'Appel aux Préparations à la Défense" étirées sur 15 jours qu'à de véritables classes. Une fois rasés, habillés, auscultés, orientés, il nous restait de longs blancs à meubler pour arriver jusqu'au soir.

 

    Nous avions alors du temps pour nous balader à travers le centre et imaginer à travers les prémices de sa fermeture prochaine; bâtiments déjà partiellement désaffectés, personnel évoquant "l'après"; ce qu'avait dû être la vie d'Hourtin durant les décennies triomphantes de cette institution aujourd'hui révolue...

     Naguère, il devait y avoir plus d'appelés pour les ramasser que de feuilles de platane sur le goudron de la cour... La conscription n'est plus et la nature et les saisons ont repris leurs droits.

 

     Le bâtiment "Courbet" où nous étions logés... Chaque matin, sur les coups de sept heures, nous étions en rang pour l'appel du matin sous le porche de l'immeuble.

Il ne faisait pas chaud et la vapeur qui montait des groupes ne provenait pas que des cigarettes de certains.

Quelques fois, nous assistions au lever du soleil sur le lac. C'était vraiment féerique... .

 

     Le 11 novembre tombant durant notre période de classe, une part non négligeable du temps avait été consacrée aux répétitions du défilé de ce jour-là... Cette photo fut prise durant une de ces séances d'entraînement du "marché au pas".

     Il y avait sur les hauteurs d'une colline surplombant le CIN, cette belle villa que j'apercevais de loin depuis une fenêtre des toilettes de notre étage et qu'ombrageait un bouquet de pins maritimes. J'imagine que c'était celle du Commandant du centre.

Quatre ans après, enfin, j'ai pu m'en approcher et confronter ses murs crème et ses stores baissés au souvenir que j'en avais gardé, encadré par la peinture écaillée des battants de la fenêtre...

     Autour de cette maison, j'ai alors exhumé tout un lotissement où logeaient sans doute à une époque les autres officiers et personnel du centre. Une petite communauté isolée qui vivait là à travers le CFM.

 

     Ce n'est maintenant plus qu'un village fantôme à peine sillonné de temps à autre par les voitures de la société de gardiennage du site...

 

Au revoir Hourtin... Bon vent et bonne mer...