L'histoire des ateliers militaires de la flotte


Le premier rôle d'équipage des ACF est conservé au Service Historique de la Défense à Toulon.
I - Les origines

L'origine des A.M.F (Ateliers Militaires de la Flotte) remonte à la fin du XVIIIe siècle, c'est d'une conception du Ministre de la Marine de 1895, Edouard Lockroy qui souhaitait une séparation entre la flotte construite de celle en construction, de l'Armée Navale et de l'usine.

L'autorité militaire doit avoir sous la main son matériel ; elle doit en disposer absoluement et complètement [...] en mettant à sa disposition dans des magasins spéciaux tout ce qui se rapporte à l'armement des unités à flot et en lui adjoignant quelques techniciens ".

II - Les Ateliers Centraux de la Flotte

Son successeur au ministère, le vice-amiral Gustave Besnard mis en application ce concept : les A.C.F (Ateliers Centraux de la Flotte) sont créés par décret le 14 août 1897. Une circulaire ministérielle du 5 juillet 1900 indique :

" Le but de la création des A.C.F est de permettre, au moyen de la main d'œuvre militaire, l'entretien économique des bâtiments et leurs réparations en adéquation avec les ressources dont dispose le Major Général ".


Equipe de football des ACF Cherbourg
(1924-26 - collection
Damien Danielou).

A l'époque les travaux qui peuvent être éxécutés par les moyens du bord ou de l'Atelier Central de la Flotte sont limités à 1500 francs. Ce qui était toutefois déjà une belle somme. L'arrêté du 16 août 1897 précise les rêgles de constitution de l'outillage, de la comptabilité des travaux et fixe les effectifs :

Le personnel sera stable et composé d'ouvriers expérimentés pour que la main d'oeuvre militaire non permanente puisse être encadrée et dirigée d'une manière utile ".

Les A.C.F ne sont qu'une annexe, qu'une sorte de continuation des navires de la Flotte, armés ou en réserve. Une partie du personnel mécaniciens des navires étaient détachés ponctuellement aux ACF, non sans une certaine réticence des commandants. Des ateliers furent créés à Cherbourg, Brest et Toulon.

II - Les ACF entre les deux guerres

Pendant la guerre de 1914-1918, la nécessité impérieuse des réparations des unités de la flotte amène une extension des charges et des effectifs des A.C.F et la création d'ateliers provisoires dans la plupart des ports et des bases. Deux nouveaux ACF sont mis en service à Lorient et à Bizerte. Mais en 1923, la réduction importante de la flotte en service conduit à une réorganisation des ACF. L'accent est mis sur les travaux au bénéfice des bâtiments.

Dans la continuité des développements techniques et du corps des mécaniciens, l'Ecole navale a accueilli en 1921, l'Ecole des officiers-mécaniciens devenue, en 1925, l'Ecole des ingénieurs-mécaniciens. Elle fonctionna jusqu'en 1966. Plus de 900 élèves y ont été formés.

L'arrêté du 28 avril 1923 fixe les plans d'armement en personnel ouvrier militaire :

Cherbourg
Brest
Toulon
Bizerte
Total
122
136
253
117
628

Le personnel des A.C.F est constitué jusqu'en 1929 par des ouvriers militaires et à partir de cette date, par des marins de direction de port et du personnel des équipage de la flotte. Ces dispositions seront conservées jusqu'à la seconde guerre mondiale.

IV - Les Ateliers Militaires de la Flotte (AMF)

Pendant la seconde guerre mondiale, les Ateliers Centraux furent très endommagés et vidés d'une partie de leur outillage. Celui de Bizerte (Sidi-Abdallah) fut presque entièrement détruit.

Ces ateliers conserveront cette appellation jusqu'en 1945. Enfin, un décret datant du 18 novembre 1945 reprendra toutes les dispositions et règlements antérieurs et les Ateliers Centraux prendront le nom d'Ateliers Militaires de la Flotte. Ce décret précise que : " Le but essentiel des A.M.F, est de contribuer à la disponibilité des bâtiments en coopérant avec les bords ". Mais les moyens mis à disposition sont alors bien faibles, et freinent leur essor. Simple prolongement des ateliers de bord, ils ne disposent d'aucun stock de matières brutes ou semi-oeuvrées et d'aucun matériel de rechange.

De plus les effectifs ouvriers militaires sont tombés à un niveau très inférieur à celui d'avant guerre :

Cherbourg
Brest
Toulon
Bizerte
Total
64
121
198
68
451

Cette situation n'est en rien acceptable. Dès 1950, il apparaît indispensable de réviser la réglementation des AMF pour leur permettre d'élargir leur concours aux bâtiments disponibles dont l'entretien s'avère de plus en plus difficile (bâtiments français fatigués ou hors d'âge, bâtiments étrangers de toutes provenance, allemands, italiens, britanniques, américains, pour lesquels l'approvisionnement en pièces de rechange est insuffisant).

La conception de l'Etat-Major Général, affirmée en particulier par les circulaires ministérielles du 20 juin et du 27 juillet 1950 peut se résumer ainsi :

Le concours des Ateliers Militaires de la Flotte aux travaux ressortissants de la DCAN (Direction des Construction et Armes Navales) sur les bâtiments en grandes réparations, doit être réduit au minimum : l'activité des AMF doit être orientée en priorité vers l'entretien et les réparations courantes des bâtiments disponibles, les CAN se trouve ainsi déchargés des travaux qui ne résultent pas d'un programme prévu à l'avance et dont l'exécution affecterait le bon rendement de leur ateliers. En principe, les bâtiments de la Flotte armés ne doivent pas demander le concours des CAN entre deux carénages, petits ou grands.

Le décret organique de 1952 fixe les missions et l'organisation des A.M.F qui prévalent encore aujourd'hui : " La mission des ateliers militaires est de mettre à la disposition du commandement des moyens industriels autonomes afin d'assurer, en toutes priorités, en toutes circonstances sans exclusive du niveau d'intervention, dans les meilleures conditions de rapidité l'entretien des bâtiments disponibles au matériel et le maintien de leur disponibilité ".

En 1952, les compétence des AMF s'étendent et comportent différentes sections : Mécanique, Electricité, Electronique, Armurerie, Torpilles, Mines, Réparations automobiles, Charpetage, Voilerie, Garniture... Ces compétences ne cesseront de s'étendre au fil du temps.

Les AMF seront ainsi capables d'intervenir à bord des navires dès 1956 à l'aide de poste autonome de soudage électrique ou de motocompresseurs. Des sous-sections sont créées pour l'entretien de matériels mobiles (appareils de plongée Cousteau-Gagnan, extincteurs,...) et des appareils frigogènes qui vont prendre une importance considérable avec l'arrivée de la réfrigération et du matériel électronique à bord. Une distinction apparaîtra toutefois dans l'entretien du matériel mobile dont une large part reviendra au service du Commissariat de la Marine.

Le 25 juin 1953 voit la création d'un atelier militaire de la flotte à Saïgon. Son existence sera brève, et l'AMF Saïgon fermera ces portes avec le retrait des troupes françaises en Indochine.


Avec l'arrivée du CEP (Centre d'Expérimentations du Pacifique) en Polynésie, un AMF sera créé à Mururoa.
Le 5 février 1955, l'AMF de Sidi-Abdallah change d'appellation et ses installations sont tranférées à Bizerte. A noter que dans la première décennie du XXe siècle existait à Bizerte une formation spéciale destinée aux travaux : les ouvriers militaires de Sidi-Abdallah.

Les années 60 voit la consécration des AMF comme institution indispensable. Les concours demandés par les bords tendent à s'intensifier, une fois vaincues les réticences de nombreux commandants qui persistaient à ne voir dans les AMF que des " bricoleurs ", et qui, en dépit d'une nouvelle réglementation, continuaient à s'adresser directement à la DCAN.

Avec l'arrivée du CEP (Centre d'Expérimentations du Pacifique) en Polynésie, un AMF sera créé à Mururoa comme à Papeete. Celui de Papeete sera dissout en 1973 (*). Il reverra le jour le 1er juin 2003 avec la dissolution de DCN Papeete.

Suite à une directive du 25 mai 1993, par laquelle le chef d'Etat-major de la Marine a engagé la Marine dans une démarche qualité, les AMF se mettront en quête d'obtenir la certification ISO 9002 délivrée par l'Association Française pour la Qualité (AFAQ). Cet objectif sera atteint en 1995.

A partir de 1996, avec la disparition progressive du service national et de la professionnalisation des armées, les AMF accueilleront du personnel civil de la défense.

La naissance du Service Soutien de la Flotte modifie la chaîne organique L'instruction du 9 août 2000 précise que : " Ces ateliers sont chargés d'exercer des opérations de maintenance intermédiaire au profit des éléments de force maritime. Ils exercent leur activité sur prescription du service de soutien de la flotte qui est donneur d'ordre ".

MP (R) Berchialla pour Net-Marine © 2007. Copie et usage : cf. droits d'utilisation.

(*) Dans un mail du 5/1/2010, un correspondant nous précise : J'ai été affecté du 13 janvier 1973 au 15 janvier 1975 à l'Atelier Militaire de la Flotte de Papeete. Il n'a donc pu être dissous en 1973 comme mentionné. (Affaire à suivre donc ...)


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